Perspectives des catalyseurs : architecture, érosion et soins de la création  

Après avoir étudié à l’étranger à la fin des années 1990, Johnny Ngunza s’est senti appelé à retourner en République démocratique du Congo (RDC) pour aider son pays à se développer. Aujourd’hui architecte expérimenté, enseignant et volontaire au sein de son mouvement national, Johnny s’engage à concevoir des bâtiments et des espaces qui glorifient Dieu et sont respectueux de l’environnement. Dans ce numéro de Perspectives des catalyseurs, il soulève une question qui va au-delà de la profession d’architecte : comment pouvons-nous tous vivre notre foi en prenant soin de notre environnement et en l’améliorant ? Lisez la suite pour découvrir comment son projet ILC aide les étudiants et les habitants de sa ville à prendre des mesures concrètes contre l’érosion.   

En grandissant en RDC, j’ai toujours admiré les amis de mon père qui étaient ingénieurs en bâtiment et en travaux publics. Je me suis dit qu’à l’avenir, je ferais un travail similaire au leur. Je suis parti étudier à l’étranger, en France et au Maroc, et j’ai commencé une formation d’architecte. C’est en m’impliquant dans un groupe d’étudiants au Maroc – qui fait partie de la famille IFES – que je me suis senti appelé par Dieu à retourner dans mon pays et à contribuer à son développement.   

Aujourd’hui, je cherche à le faire à travers mon travail d’architecte et aussi d’enseignant dans une université que j’ai fondée, qui s’appelle Another Sound of Africa (ASAf). ASAf forme des hommes et des femmes chrétiens au développement durable, au développement communautaire et à la conservation de l’environnement.    

Par mon travail dans cette université, j’étais déjà inconsciemment engagé dans un dialogue entre la foi et la science. Mais lorsque j’ai rejoint l’initiative Logos et Cosmos en 2021, la formation que j’ai reçue m’a incité à repenser complètement mon engagement envers l’université et ma profession. J’ai appris à considérer mes deux métiers (architecte et enseignant) comme des sacerdoces. Je peux exprimer ma foi à travers mon architecture et être un témoin du Seigneur sur mon campus et à travers ma profession.   

Photo de Johnny Ngunza
Johnny Ngunza

Dieu, architecte et jardinier  

La Bible décrit Dieu comme un architecte de la création et plus particulièrement de la cité céleste décrite dans Hébreux 11:16 et Apocalypse 21:2. Dieu est également décrit comme un jardinier. Dans la Genèse, au chapitre 2, nous apprenons que “l’Éternel Dieu planta un jardin à l’orient, en Éden” et que Dieu donna aux humains le mandat de prendre soin du jardin et de le cultiver.   

La question qui s’est posée à moi ces dernières années est la suivante : comment pouvons-nous habiter la terre de la manière dont Dieu l’a fait et prendre soin de notre jardin, la terre ?  

L’architecture bioclimatique  

En tant qu’architecte, je pense que l’un des moyens d’y parvenir est l’architecture bioclimatique. Ce type d’architecture prend en compte les conditions climatiques locales afin de réduire l’impact environnemental du bâtiment. C’est une architecture qui permet de réconcilier l’homme avec son environnement local.   

Selon moi, quel type d’habitat y aura-t-il au Ciel ? Je pense qu’il sera proche de l’architecture bioclimatique.  

En tant qu’architecte, j’ai relevé le défi d’introduire des questions sur nos us et coutumes en matière de construction dite “moderne” dans ma ville, Beni.   

Par exemple, autrefois, dans la plupart des sociétés traditionnelles d’Afrique, les maisons étaient conçues en harmonie avec le climat et l’environnement local. Elles étaient souvent bien conçues pour les climats chauds, par exemple en étant intégrées dans leur environnement et en ayant de la végétation tout autour de la maison pour assurer une ventilation naturelle. Elles étaient construites avec des matériaux disponibles localement – une ossature en bois ou en bambou habillée de terre crue – ce qui permettait de construire extrêmement vite avec un volume de matériaux très limité.   

Photo de la ville de Beni en RDC montrant la verdure et l'habitat traditionnel
Beni, RDC

Mais aujourd’hui, tout le monde veut avoir une maison “moderne”. La plupart des constructions dites “modernes” ne sont pas adaptées à notre environnement local. L’habitat moderne a créé un véritable fossé entre l’homme et son environnement et peut même contribuer à la destruction de l’environnement naturel.   

Je ne prétends pas que nous devons nous éloigner des méthodes modernes pour revenir aux méthodes de construction traditionnelles. Mais je pense que les architectes peuvent emprunter certains concepts à la construction traditionnelle, et nous pouvons utiliser des éléments tels que la hauteur des plafonds, l’utilisation de matériaux appropriés, l’orientation du bâtiment et la végétation pour rendre les maisons plus confortables pour les résidents et meilleures pour l’environnement naturel.   

Lutter contre l’érosion : un fléau dans ma ville  

Mon intérêt pour l’architecture bioclimatique m’a amené à mener des recherches sur les paysages et la façon dont ils contribuent au développement des espaces périurbains (où la ville rencontre la campagne) dans ma ville, Beni.   

Beni est une ville de moins d’un million d’habitants. La plupart des gens vivent de l’agriculture et nous avons un climat équatorial avec une longue saison des pluies.   

Photo d'un exemple d'érosion par l'eau devant les portes du campus de Johnny, où une parcelle de terre a été emportée par les eaux.
Exemple d’érosion

Comme de nombreuses agglomérations urbaines congolaises, la ville s’est étendue au fil des ans, mais de manière incontrôlée et non planifiée. Les réseaux de drainage et les infrastructures de base n’ont pas suivi le rythme dans les nouveaux quartiers situés à la périphérie de la ville. La végétation naturelle est supprimée lors du développement de ces nouveaux quartiers, rendant le sol nu plus vulnérable à l’érosion hydrique, ce qui entraîne ensuite la pollution, la dégradation des sols, la perte d’habitat et la perte de biens humains.  

Mon projet ILC mobilise les chrétiens pour lutter contre l’érosion à l’aide de techniques innovantes et écologiques. Il s’agit d’un projet de promotion sur le campus de mon université. L’objectif est de mettre en valeur le sol, d’améliorer la qualité de l’espace et de sensibiliser aux méthodes durables et peu coûteuses qui pourraient être adoptées à l’échelle de la ville.  

Au cours de l’année dernière, j’ai sélectionné et formé 20 étudiants du mouvement national IFES local et je les ai impliqués dans une équipe qui a mis en œuvre une série de mesures anti-érosion sur le campus, y compris l’architecture bioclimatique, l’aménagement paysager et la construction, et la plantation de végétation pour stabiliser le sol.   

Grâce à une série d’ateliers et de séances d’innovation, les étudiants ont découvert et développé des idées, expérimenté puis utilisé leurs nouvelles connaissances sur les sites de démonstration du campus. Par exemple, ils ont construit des murs de rétention et aménagé cinq jardins : un verger et des jardins maraîchers plantés de vanille, de choux, de tournesols, de soja et de fruits de la passion. Les étudiants bénévoles du projet recevront une partie du produit de la vente de ces cultures et le reste sera réinvesti dans de petites unités de transformation pour l’université, par exemple pour produire du jus à partir des fruits de la passion et pour fabriquer de l’huile de tournesol et de la farine de soja.  

Photo d'élèves construisant des murs de soutènement
Photo d'une étudiante en train de planter des cultures
Photo de trois étudiants en train de planter des choux, du soja et des tournesols.

Nous faisons de l’aménagement paysager pour lutter contre l’érosion, mais tout ce travail est sous-tendu par le « mandat culturel » qui nous est donné dans Genèse 2 : 15, à savoir être des intendants avisés de la création. Par des actions simples et pratiques, les élèves ont découvert que l’Évangile ne concerne pas seulement les humains. Il concerne l’ensemble de la création.  

C’est une opportunité précieuse pour les étudiants, car avant le début de mon projet, le personnel du mouvement national m’a dit qu’il s’engageait à aider ses étudiants à s’impliquer dans la protection de la création, mais sans programmes pratiques en place, les étudiants ne savaient souvent pas par où commencer.  

Photo of the audience at a conference with Johnny speaking at the front
Conférence communautaire

Au mois de janvier, les étudiants ont fait du travail de proximité auprès de 30 familles dans trois quartiers proches du campus pour aider à populariser notre approche de l’érosion. Ce travail de proximité a culminé avec une conférence le 28 janvier au cours de laquelle nous avons partagé notre approche avec les résidents locaux et les autorités politiques et administratives de la ville.    

Nous voulons inviter les autres à découvrir Dieu à travers la création, la nature et l’architecture.  

Bien que nous ne soyons que de passage sur cette terre, cela ne doit pas nous empêcher de réfléchir à notre mode de vie et à notre relation avec l’environnement où nous vivons. Cela fait partie de notre vocation en tant que chrétiens de prendre soin de la terre et, ce faisant, cela renforcera également notre témoignage auprès des autres.   

Je vous demande donc de réfléchir : en tant que chrétien, comment pouvez-vous améliorer la qualité de l’espace dans lequel vous vivez, en vous inspirant de la Bible ?  

Pour en savoir plus :  

Regardez une vidéo de 3 minutes dans laquelle Johnny parle de son projet (la vidéo est en français, mais des sous-titres et une transcription en anglais sont fournis).  

Suivez l’évolution du projet de Johnny sur son blog personnel (en français).  

Découvrez les 18 projets de nos catalyseurs sur nos pages web consacrées aux projets

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